Assimilation, immigration et codéveloppementLe double péché originel des Etats-Unis

27 juin 2020
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Bertrand Dutheil de la Rochère

 

 

Le 16 décembre 1773, à Boston, Samuel Adams, un des Pères fondateurs des États-Unis, monta avec soixante complices sur un vaisseau à l’ancre pour jeter à la mer sa cargaison de thé. Cette action, dite Tea-party, fut le prélude de la guerre d’Indépendance. Ces colons en révolte étaient déguisés en Amérindiens. Le conflit qui s’ouvrait put ainsi être présenté par la suite comme une première lutte de libération nationale. Pourtant ce qui séparait les Américains des Anglais était seulement l’océan.

Thanksgiving, fête sociétale et familiale, fixée au quatrième jeudi de novembre, a été instituée pour remercier Dieu de l’aide que la centaine de Pères pèlerins, qui débarquèrent, en 1620, du Mayflower dans le futur Massachusetts, reçurent des Amérindiens. Si Dieu est toujours présent dans cette célébration, les Amérindiens sont depuis longtemps oubliés.

La Tea-party et Thanksgiving montrent l’ambiguïté, pour ne pas dire l’hypocrisie, d’une nation qui s’est approprié un territoire après en avoir soigneusement éliminé les premiers habitants. Néanmoins, au XXe siècle, elle s’est présentée en championne de la décolonisation.

La constitution des États-Unis de 1787 prévoit un recensement décennal. Le premier eut lieu en 1790. Les Amérindiens en furent exclus au prétexte qu’ils ne payaient pas d’impôts. Les recenseurs répartirent le reste de la population en quatre catégories : « homme blanc libre », « femme blanche libre », « autre libre » et « esclave ». Si le statut d’esclave est évidemment abominable, il n’est que juridique. Tout système esclavagiste a toujours prévu des procédures d’affranchissement. À Rome, si un affranchi conservait à vie la macule de son origine servile, ses enfants étaient pleinement citoyens. Certains firent d’ailleurs de très belles carrières.

La catégorie « autre libre », justifiée parce que les non blancs ne pouvaient servir dans la garde nationale, reposait sur la couleur de peau, selon une règle non écrite dite One drop rule : celui qui a une goutte de sang noir est Noir. En 1890, furent même recensés à part les quarterons et les octavons. Depuis, les modalités des recensements ont considérablement évolué. Mais il n’en reste pas moins que, dès l’origine de la nation américaine, les Noirs étaient en tant que tels mis en marge.

Certes il était écrit dans la déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776 que « tous les hommes sont créés égaux ». Certes le quinzième amendement disposa, en 1870, que « le droit de suffrage […] ne pourra être refusé ou restreint […] pour des motifs tirés de la race, de la couleur […]. » Malgré ces proclamations d’intention, une inégalité de fait subsiste dans la société américaine.

Au milieu du XIXe siècle, est apparue l’idéologie de la Manifest Destiny, d’inspiration calviniste. […] Elle a servi à justifier l’élimination des Amérindiens jusqu’au génocide.

Au milieu du XIXe siècle, est apparue l’idéologie de la Manifest Destiny, d’inspiration calviniste. La nation américaine aurait pour mission divine l’expansion de la civilisation. Elle justifia la conquête du Far West, exaltée plus tard dans les westerns. Puis, en prolongation de la doctrine Monroe, cette prédestination fut étendue à tout le continent américain, qualifié d’Hémisphère occidental. Avec ses Quatorze points, Wilson l’imposa plus ou moins aux traités concluant la première Guerre mondiale. Après 1945, suivant Roosevelt, les États-Unis lui ont donné une portée planétaire. Cette idéologie souffre du double péché originel des États-Unis. Elle a servi à justifier l’élimination des Amérindiens jusqu’au génocide. Elle a oublié les Noirs, maintenus dans leur marginalité.

La question de la ségrégation raciale commença à se poser avec ampleur au cours de la décennie 1950. L’affaire Rosa Parks, qui est proprement américaine, en est emblématique. Même si l’abrogation des dispositions juridiques racistes demanda quelques années de lutte, c’était la partie la plus simple à déconstruire. Ensuite, avec l’affirmative action, il y eut l’illusion de l’anéantissement par l’inversion des termes. Mais une discrimination positive reste une discrimination. La ségrégation juridique se trouvait seulement légitimée par la moraline. En revanche, la ségrégation sociétale, celle des humiliations quotidiennes, demeurait tout aussi prégnante. Même l’élection d’un président noir avec Obama n’a pas changé la société américaine qui reste profondément racialiste.

Aujourd’hui, une minorité active, comprenant aussi bien des Blancs que des Noirs, cherche à inverser les termes de cette réalité sociétale au risque de comportements totalitaires. Ils ne veulent pas l’éradiquer. Ils veulent vengeance et repentance, selon une conception qui partage l’humanité entre races maudites et races élues. L’histoire apprend jusqu’à quels crimes conduisent de telles idées. Par capillarité, est évoqué le génocide des Amérindiens. La personne qui symbolise le lien entre les « Blancs » et le continent américain est Christophe Colomb, d’où le vandalisme sur ces statues, qui n’est en rien responsable de ce génocide. En réalité, cette crise exprime l’inquiétude existentielle d’un peuple qui n’arrive pas à se sortir de la contradiction entre son idéologie nationale affichée et les conséquences tangibles de sa propre histoire.

En France, les gauchistes et les bien-pensants incultes mettent en accusation leur propre pays sous prétexte des colonisations en Amérique et en Afrique. Mais aux États-Unis, le problème est né sur le sol même…

Or, les États-Unis ont une influence planétaire, sinon sur la culture, du moins dans le divertissement à commencer par les séries télévisuelles. Leurs tourments ont des répercussions dans le monde entier. En France, les gauchistes et les bien-pensants incultes mettent en accusation leur propre pays sous prétexte des colonisations en Amérique et en Afrique. Mais aux États-Unis, le problème est né sur le sol même où ont fusionné métropole et colonies, sans compter qu’elle résulte aussi de la conception que le peuple américain a de la nation.

Si les Français n’ont pas à dire aux Américains par quel baptême effacer leur double péché originel, ils n’ont pas non plus à les imiter au point de leur faire croire que leur problème est celui de l’humanité entière, et non celui des seuls États-Unis. Au contraire, les Français doivent tout mettre en œuvre pour éviter de l’importer. Il faut largement enseigner, sans craindre la téléologie, l’histoire de France. Sa dynamique a été l’assimilation d’ethnies différentes dans la loyauté dynastique, puis dans la citoyenneté républicaine.En même temps, par une application rigoureuse de la loi, les principes consubstantiels à la Res publica, hérités de Rome, doivent être développés en les adaptant à l’époque contemporaine pour confiner, par exemple, dans la sphère privée la généalogie de chacun, les croyances métaphysiques ou les petites patries.

 

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